mercredi 29 août 2007

"Corpus Christine" de Max Monnehay

Morceau choisi number one:



"C'est donc ça que vous voulez, hein ! Ce que je vis ne vous suffit pas ! Non, ne niez pas, je vous en prie, je sais que vous étiez pendus à mes lèvres, avides de détails morbides, bien plus touchés par le calvaire de ce gosse que par le mien, qui n'est rien, dites-le, une piqûre d'abeille, un ongle arraché, rien, rien du tout, et même vous commenciez à vous emmerder sérieusement, mais pourquoi se sent-il obligé de nous décrire ses brûlures d'estomac ? Quand va-t-il cesser de se plaindre, à la fin ? Va-t-il crever, qu'on en finisse ! Vous vous êtes fait avoir, et c'est là ma seule consolation. Vous êtes tellement prévisibles, gavés comme vous l'êtes de littérature à scandale, d'autobiographies de patineuses artistiques violées à l'adolescence, de récits de comédiens qui ont dit adieu à la drogue, concoctés par des nègres qui font d'une chute accidentelle dans un escalier une tentative d'homicide.Je vous engueule parce que j'en ai besoin. "


chapitre : 13 - page : 58 - éditeur : Albin Michel - date d'édition : 2006 -



Morceau choisi number two :



"J'ai comme qui dirait la trouille de ma vie. Eveillé, il faut que je reste éveillé. Résister, écrire sans m'arrêter, écrire encore et encore, que va-t-elle me faire, la dose est-elle mortelle ou va-t-elle s'offrir le plaisir de m'échapper de ses propres mains une fois que je serai inconscient, j'ai des sueurs froides, pauvre corps, ça sent la fin pour toi, pauvre carcasse, tiens bon, je t'en supplie, il y avait cet arbre quand j'étais petit, un chêne centenaire pile au milieu du parc, et quand papa sautait maman derrière les buissons c'est là que j'attendais, oh ce n'était pas un abandon, j'étais avec plein d'autres mômes plus malheureux que moi, des gamins dont le père avait arrêté de sauter la mère il y avait bien longtemps, et j'étais fier qu'on s'aimât autant dans ma famille. "


chapitre : 26 - page : 102 - éditeur : Albin Michel - date d'édition : 2006 -